suite et fin ... Déjà, la France, pays inventeur des box, a un marché de la télévision payante particulièrement éclaté. Jusqu'à peu, cinq opérateurs (SFR, Numericable, Bouygues Télécom, Orange et Free) se disputaient en effet les clients internet auxquels vient se rajouter spécifiquement pour la télévision l'offre satellitaire Canal Sat. Un phénomène de concentration est toutefois sur le point de tempérer cet éparpillement avec Numericable qui a croqué SFR et Orange qui se marie avec Bougues Télécom… En sortira, à coup sûr, une rationalisation des offres.
Il n'empêche. Le téléspectateur français, en plus du bouquet gratuit de la TNT avec ses 28 chaines nationales dont deux chaines « jeunesse » (France 4 et Gulli), a accès à des bouquets dits basiques qui vient compléter, dans le cadre de son accès à internet, son offre de programmes télé par une ribambelle de chaines dont certaines sont de vrais rouleaux compresseurs, Disney Channel étant la première d'entre elles.
En plus de ce bouquet, le même téléspectateur, toujours via sa box, peut compléter son offre avec des achats de VOD au coup par coup, des services illimités comme Netflix, FilmoTV ou Canalplay ou des options de chaines quasi à la carte avec par exemple, les OCS. A partir de là, il est de moins en moins enclin à souscrire un abonnement global à un bouquet entier, quand bien même se prétendrait-il prémium. Et c'est là que la deuxième particularité franco-française se pose avec le problème de l'hégémonique mais bien fragile CanalSat.
Car, si tant est qu'il le puisse techniquement, le téléspectateur français conserve-t-il un intérêt à s'abonner au bouquet fourre-tout du groupe Canal ?
En réalité, une ribambelle de contrariétés et obstacles vient le démotiver.
Déjà, il n'est pas possible de s'abonner à Canal Sat directement via le réseau câblé. Si des astuces dérivatives existent (via le Cube notamment), elles sont pénibles à mettre en place (il faut ainsi accepter l'idée d'avoir deux décodeurs) et le résultat n'est pas forcément à l'arrivée, la qualité des images étant soumise à la celle du signal et de la bande passante allouée au flux. Ensuite, des tracas administratifs se présentent en nombre à l'abonné potentiel : il faut, en effet, quand il s'agit de s'abonner à CanalSat par Orange par exemple, souscrire un abonnement supplémentaire dont les règles de vie ne sont pas les mêmes que celles du FAI natif. Les conditions de désabonnement sont laborieuses et le téléspectateur a l'impression d'être pris au piège avec une règle différente par opérateur. Libre de se désabonner de son FAI après la période d'engagement mais contraint de respecter la date anniversaire de son abonnement CanalSat au risque de se voir repartir pour un an… Et c'est tout le sentiment de confiance et de liberté qui se voit planté, d'autant plus que le téléspectateur est désormais nourri aux conditions de Netflix dont la souplesse est juste remarquable… Enfin, le fonctionnement intrinsèque des bouquets est différent jusqu'à la numérotation des chaines ! Ainsi, quand il s'agit de passer du bouquet Orange à celui de CanalSat via pourtant le même décodeur (et c'est le cas aussi chez SFR, Bouygues ou Free) le positionnement des chaines n'est pas la même. Bonjour le casse-tête pour s'y retrouver ; Canalsat ne respectant même pas la numérotation TNT pour mieux favoriser les chaines dont il est éditeur…
Et que dire des services replay qui, là-aussi, sont différents, le catalogue n'étant pas le même selon que le téléspectateur soit côté FAI ou côté CanalSat. En réalité, il est à se demander si la notion de simplicité a été prise en compte à un moment donné dans l'établissement des offres. Dans tout cela, l'offre de télévision Disney a perdu en visibilité. Il est tellement laborieux d'accéder aux chaines Disney XD, Disney Junior et Disney CINEMA que le téléspectateur en a fait son deuil et se contente de l'offre concurrente bien plus facile d'accès.
Ce constat est d'ailleurs le même pour les services de télévision Disney. Disneynature | tv n'a jamais été déployée partout, Disneytek s'est contentée de Free tandis que Disney Channel Pop Pick Play dont l'accessibilité est plus large ne fait que proposer un catalogue de bric-et-de-broc, sans cohérence éditoriale. La télévision payante est à un tournant en France. Savoir y trouver sa place est la condition de survie des modèles et des chaines. Si Disney Channel a su le faire, le reste du bouquet de chaines Disney (XD, Junior, CINEMA, Disneynature | tv…) et ses services VOD attenants n'y sont manifestement pas encore parvenus. La faute à une conception datée du rapport du téléspectateur aux programmes :
non, il ne s'abonne plus à un bouquet généraliste fourre-tout pour avoir accès à une chaine qu'il désire en se frappant toute une ribambelle d'autres dont il n'a que faire ;
non, il ne conçoit plus d'être lié par des conditions d'abonnement remontant à la télévision des années 90 ;
non, il n'admet plus d'empiler les décodeurs dans son salon...
Le téléspectateur des années 2015 veut avoir accès aux programmes, chaines et services, facilement sans avoir se poser la question de savoir si la chaine ou le programme qu'il vise est disponible ou non chez son FAI, sans fil à la patte, avec des conditions d'abonnement simple, sans anicroche technique ridicule (une chaine doit avoir le même numéro partout et sa qualité de l'image doit être constante), sans contrainte de temps sur la disponibilité des programmes…
L'industrie du disque en refusant de changer son modèle s'est fait laminer par le changement de comportement des consommateurs qui sont allés chercher ailleurs que sur les canaux traditionnels la musique qu'ils visaient.
Si l'industrie de la télévision ne prend pas le virage à temps, elle connaitra le même sort et cherchera trop tard à se sortir d'un modèle d'exploitation daté, les canaux parallèles ayant entre temps le beau jeu de prendre le relai.
C'est tout l'enjeu et il est d'autant plus important pour Disney qui, synergie oblige, fait reposer tout son marchandisage sur le succès de ses productions et donc de leur accessibilité.
Aucune poupée, aucune peluche ne se vendra si son personnage n'a pas, à la base, l'exposition, qu'il se doit d'avoir auprès du public…
source Chronique Disney